Lu la semaine dernière : « Avec le sentiment d’être pris pour un bouc émissaire, ce dernier (Jean-Michel Blanquer) poursuit : "On traite toujours les mêmes et ça devient vraiment très très lourd à porter et j’espère en tout cas que l’État va continuer à nous accompagner ». (linfo.re)
Bouc émissaire. Étrange, non ? Je me suis toujours étonné de l’existence de cet attelage improbable, sorte de tournedos Rossini au ketchup de la langue française. Comment deux mots aussi éloignés l’un de l’autre ont-ils bien pu un jour se rencontrer pour former un couple aujourd’hui encore solidement installé dans nos mœurs langagières ?
Naïf, je m’étais pris à imaginer un brave petit bouc, message accroché à l’encolure, s’en allant jouer les facteurs chez quelque destinataire en mal d’odeurs fortes. C’était trop joli pour être vrai.
La réalité est plus féroce. C’est dans la religion juive qu’il faut rechercher l’origine de cette mystérieuse expression. La légende raconte que pour expier les fautes du peuple d’Israël, un grand prêtre les chargea sur un bouc domestique qu’il chassa vers le désert d’Azazel, nom d’un ange déchu accusé d’avoir perverti les hommes. L’animal tiré au sort était ainsi envoyé, tel un émissaire expiatoire, à la rencontre du démon.
Apparue dans le langage courant à la fin du XVIIe siècle, l’expression s’est imposée dans l’usage pour désigner une personne que l’on tient indûment pour responsable de toutes les fautes, de tous les maux. L’Histoire recèle de boucs émissaires célèbres. Le plus connu d’entre eux est sans nul doute le capitaine Alfred Dreyfus, condamné à tort pour espionnage en 1894, dégradé, déporté puis finalement réhabilité douze ans plus tard. Notre brave petit bouc n’a pas eu cette chance.
Demain, suite du bestiaire, je vous parlerai de l’expression « enculer les mouches ».
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