vendredi 19 juillet 2024

Récidive... à répétition

Lu il y a deux jours : « Des départs de feu à répétitions dans les champs de cannes ont été signalés dans le sud. » (linfo.re)

Allez, soyons honnêtes, lequel d'entre nous n'a jamais succombé à la tentation d'affubler d'un « s » final le substantif « répétition » dans l'expression « à répétition » ? L'erreur est d'ailleurs fréquente dans la littérature, et inutile de dire qu'elle l'est tout autant dans la presse écrite, et ce, malgré les mises en garde répétées de nos dictionnaires usuels (Le Robert, Larousse, Littré) :
– « Nestlé : entre mensonges sur l'eau et cessions à répétitions, où va le groupe ? » (Capital)
– « Des messages à répétitions demandent aux utilisateurs de réinitialiser leur identifiant Apple. » (Le Monde informatique)
– « Accidents à répétitions, violences : faut-il en finir avec les fêtes foraines ? » (RMC)
Quand on y regarde de plus près, l'emploi du singulier relève pourtant d'une implacable logique. Si dans des expressions telles que « par moments » ou « par intervalles », « moments » et « intervalles » désignent les points d'étapes d'un phénomène répétitif, d'où la présence du pluriel, dans « à répétition », « répétition » exprime le phénomène lui-même, autrement dit, le fait de réitérer une action. Le singulier est donc de mise. Le même raisonnement vaut pour l'expression « par intermittence ». 
Une règle de français qui semble avoir échappé à mes anciens confrères de linfo.re., auteurs de la même erreur à sept reprises en l'espace de neuf mois. Sur la route, une telle succession d'infractions aurait déjà coûté un retrait de permis à son auteur. Mais sur la Toile, c'est bien connu, l'entorse au bon usage n'a jamais constitué un délit passible de sanctions. Y compris en cas de multirécidive.   

mercredi 17 juillet 2024

Démo(t)bilisés

Lu dimanche : « Au total, ce sont 705 personnes, soit 577 troupes à pied et 128 en véhicule, qui défilent depuis 11 h au Barachois. » (clicanoo.re)

Je m'étais presque habitué – résigné serait plus exact – à lire des phrases du type :
– « Un millier de personnels mobilisés dans l’Aisne pour accompagner la flamme olympique le 17 juillet. »
– « Plus de 550 effectifs ont été engagés, afin de faire respecter les arrêtés préfectoraux d’interdiction de port et transport d’armes et d’organisation de combats de rue. »
– « 2 700 forces de l'ordre vont être déployées sur les zones les plus sensibles du territoire néo-calédonien. »
Et voilà que dimanche, je découvre à la lecture d'un article publié sur le site clicanoo.re, avatar numérique du Journal de l'île, que « 577 troupes à pied et 128 en véhicule » s'apprêtent à parader sur le Barachois à l'occasion des célébrations du 14-juillet. À toutes fins utiles, rappelons qu'à l'instar de « personnel », d' « effectif » et de « forces de l'ordre », le mot « troupe » désigne un ensemble de personnes et non les éléments de cet ensemble pris individuellement. Cela étant dit, j'espère que le sacrosaint défilé dionysien aura fait le bonheur des nombreux publics attroupés sur le front de mer de Saint-Denis. 

lundi 15 juillet 2024

No soucy

Lu jeudi dernier : « "Que ce soit ici ou ailleurs. je saurai gérer pas de soucis", ajoute Michael Rodier, conducteur de bus. » (linfo.re)

« Il n'y a pas de souci(s) », « pas de souci(s) »… Eh bien si, justement, il y en a un. Comme souvent, en effet, l'usage ne semble guère se soucier des injonctions puritaines de l'Académie française. « On entend trop souvent dire il n’y a pas de souci, ou, simplement, pas de souci, pour marquer l’adhésion, le consentement à ce qui est proposé ou demandé, ou encore pour rassurer, apaiser quelqu’un, souci étant pris à tort pour difficulté, objection », s'inquiétaient les grands sages du quai Conti, dès octobre 2011. 
Treize ans se sont écoulés et la prolifération des expressions visées s'est accélérée. Au point qu'aujourd'hui, on se préoccupe moins de leur bien-fondé que de la présence ou non d'un « s » final à « souci(s) ». « "Pas de souci" ou "pas de soucis" ? », s'interroge le Projet Voltaire. « Pas de "soucis" ou "souci" : que faut-il écrire ? », reprend en écho le quotidien 20 Minutes quand Le Figaro écrit : « "Pas de souci(s)" : que faut-il écrire ? ». En cette période post-électorale, disons tout de suite que le singulier l'emporte largement dans les suffrages, tout comme il s'était imposé dans « pas de problème », autre tic de langage naguère décrié. L'humain ne serait donc tracassé que par un souci à la fois. À voir…
Pour ce qui est de la question sémantique, je serais enclin à rejoindre les détracteurs de l'expression « pas de souci(s) » au sens de « pas de problème(s) », « souci » n'ayant jamais été un substitut de « problème », que je sache. En revanche, il est bel et bien synonyme de « préoccupation », d' « inquiétude », et sous ces acceptions, l'emploi de « pas de souci(s) » me paraît des plus... acceptables.
No soucy ?

samedi 13 juillet 2024

Toutes ensemble, toutes ensemble !

Lu hier : « Lorsque les neuf éoliennes fonctionneront toutes ensembles, elles produiront cinq fois plus d’énergie que le précédent parc qui en comptait... 37. » (clicanoo.re)


Je passe en coup de vent pour rappeler : 
– qu'au sens de « les un(e)s avec les autres », « ensemble » est un adverbe ;
– qu'un adverbe est invariable.
Et donc :
– que dans le cas qui nous occupe, « ensemble » est invariable. 
Syllogique, non ?

mercredi 10 juillet 2024

Aujourd'hui est un autre jour

Familière, populaire, employée par plaisanterie ou par pédanterie, « pléonasme caractérisé » pour les uns, « affreuse tautologie » pour les autres, l'expression « au jour d'aujourd'hui » s'installe chaque jour un peu plus dans l'usage courant au sens d' « actuellement », de « présentement ». Mais n'allez pas croire qu'il s'agisse là d'une dérive langagière de plus de notre permissive époque. S'il a connu un développement spectaculaire à partir du début du XXe siècle, le tour critiqué aurait été observé dès le XVe siècle. On le retrouvera plus tard dans la littérature sous la plume d'auteurs célèbres tels que Lamartine, George Sand et plus près de nous, Maurice Genevoix ou Bernard Clavel. 
Et pourtant… L'attelage est d'autant plus risible qu'il ne contient pas un, mais deux pléonasmes. Formé au 
XIIIe siècle, « aujourd'hui » renferme en effet le terme de l'ancien français « hui » (« le jour où l'on est »). « Au jour d'aujourd'hui » signifie donc littéralement « au jour au jour du jour où l'on est ». 
Malgré son indéniable caractère pléonastique, « aujourd'hui » fait depuis longtemps partie de notre vocabulaire et il en est hélas ! de même pour « au jour d'aujourd'hui », « fort peu recommandable » selon Littré, mais « pas incorrecte » à condition « de ne pas en abuser », tempère l'Académie, manifestant dans cette affaire une inhabituelle propension à se mettre au goût du jour.
Les Immortels du quai Conti ne sont pas les seuls à manifester quelque indulgence. Bon nombre de linguistes considèrent que, contrairement à un simple « aujourd'hui », moins précis et souvent compris au sens large de « de nos jours », « au jour d'aujourd'hui » insiste sur l'instant présent et équivaut davantage à « actuellement », « maintenant », « en ce moment ». Et pour tout vous dire, l'argument me semble des plus recevables. 
Nettement moins tolérable est cette manie actuelle qui consiste à user – sans doute par confusion avec la locution « à l'heure actuelle » – du curieux tour « à l'heure d'aujourd'hui », dont le rayonnement ne cesse de s'étendre, y compris dans la sphère politique. Ainsi, dimanche soir, interrogé sur l'avenir d'une France coupée en trois, un député de gauche fraîchement réélu répondit qu' « à l'heure d'aujourd'hui, il (était) encore trop tôt pour le savoir ». Demain sera un autre jour…

dimanche 7 juillet 2024

Ni « que » ni tête

Lu la semaine dernière : « Des propos qui ont fait réagir les politiciens réunionnais, mais pas que.  » (linfo.re)

« Elle fabrique des animaux en porcelaine artisanale, mais pas que ! » (Le Bien public)
« Les équipes de la médiathèque iront à la rencontre des habitants pour proposer des animations en lien avec la lecture. Mais pas que. » (La Dépêche)
« Malade, mais pas que… » (Ouest-France)
Le Bien public, La Dépêche, Ouest-France, mais pas que… Au cours du mois écoulé, pas moins d'une trentaine des plus beaux fleurons de la presse écrite ont usé de cette expression à la mode qui, bien que jugée « humoristique », ne fait pas rire les grands maîtres-queux de la langue. Vous l'aurez compris, je veux parler de l'attelage « mais pas que » et de sa variante « et pas que ». La palme du comique de répétition revient sans conteste au Parisien : « Des sons qui claquent mais pas que, des tubes ringards mais pas que, du Gin Tonic mais pas que, des reprises chantées en Live mais pas que (y'a un Dj aussi), des jeunes des vieux mais pas que, des garçons des filles mais pas que… » 
Les linguistes sont unanimes : cette invasion virale n'a ni que ni tête. Pourquoi ? D'abord, parce que grammaticalement parlant, « que « ne peut être employé absolument, autrement dit sans complément. Ensuite, parce que « pas que » n'est qu'une élision impropre de la locution « ne pas… que ». Mais il n'y a pas que ça. Les puristes arguent que la coupable « mais pas que » ne peut se substituer à « mais pas seulement » ou à « mais pas uniquement », « que » n'étant en aucune façon synonyme de « seulement » ou d' « uniquement ». 
« N'hésitez donc pas à submerger de vos protestations les orateurs médiatiques professionnels qui ont pris le pli aberrant de ponctuer, avec sérieux, leur propos par ce "mais pas que" ou "pas que", à la manière d'un enfant en bas âge », fustigeait déjà l'Académie française en 2015, résumant ainsi le sentiment général des défenseurs du bon usage. Et pas qu'eux… 

samedi 6 juillet 2024

Autant que faire se peut

Lu mercredi : « Ce mercredi 3 juillet dans la matinée, une femme s’est faite agressée par trois individus à Saint-Paul. Selon la gendarmerie, la victime a dû se réfugier dans un bar. » (linfo.re)

Que dire ? Qu'il s'agit là d'un travail ni fait ni à faire ? Ni plus ni moins ? L'accord des verbes pronominaux n'est certes pas une mince affaire, je vous l'accorde. Mais comment ne pas être frappé par ce « s'est faite agressée » à tout le moins violent pour qui se veut respectueux du bon usage ? 
Il y a d'abord ce participe passé (agressée) qui n'a rien à faire là où un infinitif eût été plus seyant. Et voilà qui change tout car dès lors, ce n'est plus un mais deux verbes qu'il s'agit de réaccorder. Les grammairiens, comme un seul homme, nous disent en effet que sous sa forme pronominale, le verbe « faire » est toujours invariable lorsqu'il est suivi d'un infinitif. Peu d'entre eux, en revanche, prennent la peine d'expliquer pourquoi. Grevisse se jette à l'eau : « Le participe […] est invariable, parce qu'il fait corps avec l'infinitif et constitue avec lui une périphrase factitive », explique-t-il dans son biblique Bon Usage. 
« Périphrase factitive »… Mouais, je ne suis pas sûr que vous soyez plus avancé. Je vais tenter d'éclairer votre lanterne. Pour faire simple, disons que le participe passé d'un verbe – essentiellement ou occasionnellement – pronominal suivi d'un infinitif ne s'accorde avec le sujet de la phrase que si ledit sujet réalise l'action des deux verbes. Exemple : Ils se sont vus mourir (« ils » voient et meurent → on accorde). Mais on écrira : Ils se sont vu condamner à une lourde peine (« ils » voient mais ne se condamnent pas eux-mêmes → pas d'accord). Il en est de même dans la phrase erronée citée en introduction. Il convenait d'écrire : « Une femme s'est fait agresser par trois individus », la pauvre femme ne s'étant évidemment pas agressée elle-même. Vous avez saisi la nuance ? Avouez qu'il n'y avait vraiment pas de quoi s'en faire une montagne. 

mercredi 3 juillet 2024

Couples hermaphrodites

Lu aujourd'hui : « Elle a été blessée, mais a pu compter sur l’aide d’une couple de passants. » (linfo.re)

Une fois encore, je mettrai le dérapage linguistique du jour sur le compte d'un clavier d'ordinateur trop glissant. Et puis, y a-t-il dérapage après tout ? Il est fondé de se poser la question quand on sait que « couple » est un terme hermaphrodite. Les ouvrages de référence nous expliquent en effet que ledit mot change de sexe comme de sens. Il est masculin lorsqu'il désigne deux êtres humains unis par amour, par amitié ou liés par un intérêt commun. On parlera d'un couple de mariés, de danseurs, d'associés, de cambrioleurs ou d'animaux à la condition pour ces derniers qu'il s'agisse du mâle et de la femelle, ce qui, vous l'avouerez, est parfois délicat à déterminer. 
Le détail a pourtant son importance, car si nos bébêtes s'étaient trouvées réunies accidentellement, c'est le féminin qui l'eût emporté. Ainsi, c'est une couple et non un couple de poulets que vous avez peut-être l'habitude d'envoyer rôtir au four. Par extension, le principe vaut pour deux choses accouplées par hasard : une couple d'œufs, de torchons ou d'heures, Robert admettant également le masculin dans ce cas précis. 
Les spécialistes de la langue nous rappellent enfin que « paire » doit être préféré à « couple » pour des choses qui vont naturellement ensemble : des boucles d'oreille, des souliers, des chaussettes, fussent-elles dépareillées… Je compte hélas ! dans mon entourage plus d'une paire de couples d'amis à qui cette règle irait comme un gant.  

mercredi 26 juin 2024

Une civilité dans tous ses états

Il y a quelques jours, je souhaitais souscrire un abonnement à un site d'information en ligne que je ne nommerai pas quand je suis tombé sur un questionnaire à renseigner, comme on dit de nos jours, qui commençait ainsi : 

Civilité : Mme, M.

Je me suis alors souvenu d'un billet publié en avril 2013 par l'Académie française sous sa rubrique Dire, ne pas dire. La vénérable institution s'y indignait de voir « aujourd’hui de plus en plus souvent figurer sur les formulaires l’étrange rubrique Civilité qu’il convient de remplir en indiquant si l’on est un homme (Monsieur) ou une femme (Madame). » « Ce nom est bien sûr lié étymologiquement à l’adjectif civil mais il n’est en aucun cas synonyme de la locution état civil et ne peut pas non plus se substituer à titre ou à qualité », argumentaient les vieux sages du quai Conti, soulagés à l'époque que « tous les dictionnaires s’accordent à ne reconnaître au nom civilité que les deux sens suivants : au singulier, il désigne une manière courtoise et polie de vivre et de se comporter en société et, au pluriel, les manifestations de cette courtoisie et de cette politesse. »

Mais ça, c'était avant. Avant qu'une « vague de civilité » ne submerge les mœurs administratives de notre pays. Avant, surtout, que ne cèdent les ultimes défenses de ceux que nombre d'entre nous considèrent – à tort ou à raison – comme les garants du bon usage. Vous voyez bien sûr de qui je veux parler. 

Noms : Larousse et Robert

Civilité : Messieurs

Années de naissance : 1852 pour le premier,  1951 pour le second

Lieu de naissance : Paris

Prénoms des pères : Pierre (Larousse) et Paul (Robert)

Profession : dictionnaires ouverts à tous les vents

vendredi 21 juin 2024

« Quel...que », oui mais lequel ?

Lu lundi : « Nous avons également saisi l'occasion de leur rappeler l'importance des valeurs familiales et de la place essentielle qu'occupe un papa dans nos vies quelque soit notre âge", confie Citalis. »
(Imaz Press Réunion)

L'erreur est indémodable. Elle figure d'ailleurs en bonne place dans tous les quiz ou ouvrages consacrés aux pièges du français et ce,… quel qu'en soit l'auteur. C'est dire sa « dangerosité » auprès des usagers de la langue que nous sommes. Et je ne me berce d'aucune illusion : ce n'est pas cette modeste chronique qui suffira à stopper les ravages causés par la confusion entre les homophones « quel que » et « quelque », lesquels, sur le plan grammatical, n'ont pourtant rien en commun. 

Commençons par le premier nommé. L'adjectif relatif « quel que » (en deux mots), car telle est sa fonction, équivaut, à quelques nuances près, à « n'importe quel », « peu importe ». Ainsi, Quel que soit le temps qu'il fait, il s'astreint à deux heures de marche quotidiennes revient à dire Peu importe le temps qu'il fait, il s'astreint à deux heures de marche quotidiennes ou Il s'astreint à deux heures de marche quotidiennes par n'importe quel temps. 
« Quel que » a la particularité de toujours précéder un pronom personnel ou un verbe conjugué au subjonctif, le plus souvent l'auxiliaire « être ». Enfin, considéré comme un attribut du sujet, il s'accorde logiquement avec ce dernier. C'est donc lui qu'il convenait de trouver dans la phrase citée en introduction :  « […] de leur rappeler l'importance des valeurs familiales et de la place essentielle qu'occupe un papa dans nos vies quel que soit notre âge. »

De par ses emplois multiples, son presque sosie « quelque » (en un mot) offre un profil autrement complexe, au point de devenir très vite un casse-tête pour qui ne maîtrise pas ses nuances. Déterminant, il s'emploie au pluriel au sens de « plusieurs » et au singulier lorsqu'il signifie « un certain ». 
Quelques (plusieurs) centaines de manifestants ont défilé dans les rues de la commune.
J'ai eu quelque (une certaine) peine à le reconnaître. (Larousse)
Nous ne nous pas revus depuis quelque temps.
Il s'accorde également quand il est suivi d'un nom, lui-même suivi de « que ». 
Quelques amis qui m'aient trahis, je garde encore la foi en l'être humain.
Mais « quelque » peut aussi endosser l'habit d'adverbe au sens de « environ ». Dans ce cas, bien entendu, il ne varie pas au pluriel.  
Quelque (environ) 500 manifestants ont défilé dans les rues de la commune. 
Suivi d'un adjectif et de « que », il devient synonyme de « si » et là encore, il ne s'accorde évidemment pas. 
Quelque bienveillants qu'ils soient, ils voient souvent leur patience mise à rude épreuve. 

Voilà qui met un point final à ma prose du jour. Espérant que ces quelques lignes auront suscité en vous quelque intérêt, je vous laisse. Le moment est venu pour moi d'aller me consacrer aux quelque deux heures de marche auxquelles je m'astreins chaque jour, quelque part, là-bas, le long du magnifique littoral sainte-marien. Et cela, quelle que soit la couleur du ciel…

mercredi 19 juin 2024

Pour tout renseignement...

Lu la semaine dernière : « Pour la procédure en ligne, l’électeur se rend sur le site internet www.maprocuration.gouv.fr, renseigne les informations et obtient un code. » (Outre-mer la 1ère)


J'ai un petit faible pour les employé(e)s de La Poste. Je les trouve très serviables, pas vous ? J'ai encore pu le constater pas plus tard que vendredi dernier. Aussi, quand la gentille dame qui me guidait dans mes démarches me demanda de « renseigner le formulaire » dont elle avait besoin, je me contentai, par bienveillance, d'accuser réception, me disant que toute remarque langagière de ma part resterait sans doute lettre morte. 

Elle m'aurait d'ailleurs pris pour un vieux timbré. Il est vrai qu'à l'oral comme à l'écrit, l'expression « renseigner quelque chose » s'est répandue à vitesse virale dans toutes les administrations de France, de Navarre et par ricochet, de La Réunion. Et ça a le don d'agacer certains amoureux du bien-parler. Prenez Alfred Gilder ! Dans son livre Les 300 plus belles… à ne pas faire, il déclare sans ménagement : « Renseigner la feuille d'imposition, non ! on la remplit, de même qu'on remplit un questionnaire, on y répond. On renseigne quelqu'un et non une chose. » Et pan ! Hanse (Dictionnaire des difficultés du français) y va lui aussi de son couplet réprobateur : « On entend parfois "renseigner une fiche" pour "remplir une fiche". On ne fournit pourtant pas à la fiche les renseignements qu'elle demande. » Quant à Littré, il préfère ignorer le tour critiqué, mais son silence en dit long sur l'intérêt qu'il lui porte. 

L'affaire serait classée si nos Dupond et Dupont de la langue, Larousse et Robert, n'étaient passés par-là, faut-il s'en étonner ? Selon eux, il n'y aurait plus rien de blâmable à employer « renseigner » au sens de « compléter avec les informations appropriées », nous dit le premier, ou de « remplir avec l'information attendue », renchérit le second. Exemples choisis : renseigner une fiche (Robert), renseigner un formulaire (Larousse). 

Bien évidemment, vous vous en doutez, l'Académie ne l'entend pas de cette oreille. Mais comme l'heure passe et que j'ai des milliers de choses à faire, je vous invite à vous rendre à la rubrique Dire, ne pas dire de son site internet. Vous trouverez sur le sujet tous les renseignements complémentaires que vous désirez. 

mardi 18 juin 2024

La peau des fesses

Entendu récemment : « Au fil des témoignages, les accusations se sont réduites à peau de chagrin. » (RTL)

Coup de peau… Pour une fois, je ne vais pas vous tanner avec une obscure et indigeste règle grammaticale, mais vous parler d'une expression – une de plus – qui s'est perdue en chemin. Peut-être l'avez-vous remarqué, il n'est plus un jour que Dieu fait sans que l'on croise dans la presse écrite des phrases du genre : « La hausse de la Bourse de Paris réduite à peau de chagrin » (Les Échos), « la dermatologie, une spécialité réduite à peau de chagrin » (Libération), ou encore « à Ouistreham, les activités nautiques réduites à peau de chagrin pour les écoliers » (Ouest-France). Et j'en suis réduit à une immense perplexité tant je ne trouve aucune raison logique à cette abusive déformation. 
Pour rappel, l'expression originelle, la vraie, la seule attestée, même de nos jours permissifs, est : « comme (une) peau de chagrin » dans laquelle le chagrin en question n'a rien à voir avec celui qui « ne nourrit pas, mais fait grossir », chantait Barbara. Emprunté du turc sagri (croupe d'un animal et par métonymie, la peau de l'animal elle-même), le mot est devenu « sagrin » dans notre vocabulaire (XVIe s.), puis « chagrain » (XVIIe). Il désignait le cuir fait à partir de la peau de la croupe de l'âne, de la chèvre, du cheval ou du mulet, selon les versions, qui servait à fabriquer tambours, chaussures, sacs ou reliures de livres. 
On doit la notion de réduction à Honoré de Balzac et à son célèbre roman Peau de chagrin (1831). Dans « cette fresque réaliste de la situation politique dans la France de 1830 » invitant le lecteur « à méditer sur la force de la volonté, du désir et de l'ambition », décrit Hachette, Balzac raconte la lente déchéance de Raphaël de Valentin, jeune homme ambitionnant de devenir un grand écrivain, mais qui, influencé par son ami Rastignac, sombre dans une vie de débauche. Sans le sou, désespéré, il trouve chez un antiquaire une peau de chagrin lui permettant d'exaucer tous ses souhaits. Mais à chaque vœu réalisé, la peau se réduit en même temps que la vie de son propriétaire, jusqu'à ce que les deux finissent par disparaître. 
Depuis lors, l'expression « comme peau de chagrin » s'est popularisée pour évoquer une chose qui ne cesse de s'amenuiser : notre confiance dans les discours politiques, par exemple, notre pouvoir d'achat, nos espoirs d'une vie meilleure, le respect de la langue française… tout ce qui fait qu'affligés par notre triste sort, nous n'avons plus que les yeux pour pleurer. 

samedi 15 juin 2024

Des goûts et des accords

Lu cette semaine : « Une bonne centaine de personne (sic) s’est réunie au jardin de l’Etat à Saint-Denis pour l’étape finale du relais de la flamme olympique. » (linfo.re)

Sujet au singulier (une centaine), verbe au singulier (s'est réunie). Tout va pour le mieux dans le meilleur des mots, n'est-il pas ? Eh bien, que nenni ! Le croire serait oublier un peu vite que la langue française est championne olympique de la subtilité – ou de la torture de cerveau – et que le sujet dont il est question est justement un drôle de sujet. Au même titre que « bande, foule, horde, multitude, nuée, partie, majorité, colonie, cortège, nombre, ribambelle, totalité, troupeau » et des dizaines d'autres, « centaine » est en effet ce que l'on appelle un nom collectif, en décrypté, « un nom au singulier représentant une quantité plurielle d'individus ou d'objets », éclaire de sa flamme Le Robert en ligne.
Lorsqu'il est employé seul, le nom collectif est naturellement suivi d'un verbe au singulier. « La troupe bivouaquait près de la rivière. » Une exception (déjà !) : la locution « la plupart », qui, employée sans complément ou avec un complément au pluriel, exige un accord verbal au pluriel : « la plupart sont encore en vie », « la plupart des personnes interrogées sont toujours en vie ». Mais on écrira à bon droit : « La plupart de son temps libre est consacré au sport. » Fin de la parenthèse. 
Pour tous les autres noms collectifs, de deux choses l'une : ou ledit nom est précédé par un déterminant défini, possessif ou démonstratif et c'est lui qui guide l'accord (« La foule des manifestants s'est dirigée vers l'hôtel de ville), ou il est précédé par un déterminant indéfini (un, une) et dans ce cas, l'accord ne dépend plus des règles grammaticales mais du sens et de la logique de la phrase, on parle d'accord par syllepse, déjà évoqué dans un billet publié il y a un peu plus de deux ans (https://moucatalire.blogspot.com/2022/03/laccord-moitie-vide-moitie-plein.html). Il faut alors se poser la question suivante : qui cherche-t-on à mettre en exergue : le nom collectif ou son complément ? 
Exemples : 
« Une foule de manifestants s'est dirigée vers l'hôtel de ville » (les manifestants sont ici considérés comme un tout, on met donc l'accent sur la foule).
« Une foule de manifestants se sont exprimés contre la réforme des retraites » (les manifestants sont cette fois considérés dans leur pluralité : chacun s'exprime contre la réforme). 
Il est à noter que dans de nombreux cas, l'accord peut se faire tout aussi bien avec le nom collectif qu'avec le complément. Tout dépend de l'intention de l'auteur. « Un grand nombre de soldats fut tué dans ce combat », écrit Littré ; « un grand nombre de soldats périrent dans ce combat », préfère l'Académie. Des goûts et des accords…

vendredi 14 juin 2024

Pas de quoi se faire de l'habile

Lu il y a quelques jours : « Les fautes sont bien réparties entre le rythme effréné des Parisiennes, leur facilité naturelle dans les transitions et leur habilité à sept mètres, et la cible qui s'abandonne pour les Réunionnaises. » (clicanoo.re)

Sûr que notre journaliste a dû se « faire de l'habile » en découvrant publiée dans les colonnes du Journal de l'île sa bévue du jour. Mais il était trop tard. Le mal était fait. Le mal ? Avoir confondu le substantif ou participe passé « habilité » (aptitude légale à, doté de la capacité officielle à réaliser une action) avec son paronyme « habileté » (adresse, doigté). Une malencontreuse coquille à mettre davantage sur le compte de la fatigue que d'une méconnaissance de la langue française, cela va sans dire. Loin de moi, donc, l'idée de tirer à ballons rouges sur l'infortune de mon ancien confrère. Au nom de quoi serais-je habilité à juger l'(in)habileté d'autrui ?

jeudi 13 juin 2024

Ne crions pas victoire !

Lu il y a quelques jours : « COSPN reste invincible. » (Midi Madagascar)

« Finale de Ligue des champions : le Real Madrid, encore et toujours invincible » (Sud Ouest)
« Toulouse. Le Stade Toulousain n'est plus invincible » (La Dépêche)
« Ligue Europa : Leverkusen reste invincible et va en finale contre l'Atalanta Bergame » (L'Express de Maurice)
La presse sportive est décidément imbattable sur le terrain des dérives langagières. J'en veux pour preuve cette manie actuelle – une de plus ! – qui consiste à faire endosser abusivement à l'adjectif « invincible » le maillot de son cousin  « invaincu ». Or, si le premier traduit un état de fait inaltérable, le second repose uniquement sur un constat dressé à partir d'évènements passés. En revanche, il ne présage en rien un avenir radieux. Par exemple, dire que le Paris Saint-Germain est invaincu n'a pour autre but que de traduire les bonnes performances du club de la capitale sur une période donnée ; prétendre qu'il est invincible... relève du fantasme.
Quant aux supporters de la langue française, il y a beau temps qu'ils ne rêvent plus. Ils se sont résignés à vivre au rythme des défaites. 

mardi 11 juin 2024

Évidence trompeuse

Lu dimanche : « Une tâche loin d'être évidente, se rendre dans une administration est toujours une difficulté pour ce jeune en raison de son handicap. » (Outre-mer la 1ère)

L'Académie et les puristes le condamnent. Robert l'ignore, ce qui revient à le condamner. Littré et Larousse le qualifient de « familier », mais le mentionnent tout de même, une manière déguisée de l'adouber ou au contraire, de dire « je vous dis qu'on le dit, mais il est préférable de ne pas le dire ». Of course ! Quoi qu'il en soit, il y a de toute évidence désaccord entre les linguistes au sujet de l'emploi de l'adjectif « évident » (« qui est une certitude absolue », « flagrant », « manifeste », « criant »…) au sens de « facile » et par ricochet, du bien-fondé de l'expression populaire « ce n'est pas évident » là où « ce n'est pas facile » eût fait l'affaire. 
« Pour cela, il faudra convaincre l'AC Milan de lâcher son latéral gauche, ce qui s'annonce pas évident compte tenu de l'importance de l'ancien joueur du Real Madrid. » (Le 10sport)
« Pour cela, il faudra convaincre l'AC Milan de lâcher son latéral gauche, ce qui s'annonce pas évident compte tenu de l'importance de l'ancien joueur du Real Madrid. » (Ouest-France)
« Il n’est pas évident de trouver ses réalisations sur Internet (1), noyées dans la masse de vidéos […] » (Sud Ouest)
Au vu des extraits d'articles ci-dessus, il est évident que la nuance ne s'est pas imposée à l'esprit de tous les usagers de la langue.  

lundi 10 juin 2024

On s'éparpille !

La nature a horreur du vide. Enfin, à ce qu'il paraît. Nous serions fondés à en douter à la vue des tribunes « clairsemées » (selon Le Parisien, Ouest-France, La Dépêche ou encore L'Indépendant) de Roland-Garros, vendredi soir, lors de la demi-finale en clair-obscur entre Alexander Zverev et Casper Ruud. Il faut croire que les belles dames et beaux messieurs de la porte d'Auteuil, d'ordinaire si prompts à se montrer dans les travées mondaines de « Roland », étaient allés se faire voir ailleurs. 
Le même jour, et non loin de là, ce n'était pas non plus la grande affluence (200 députés présents sur 577) à l'Assemblée nationale, théâtre du discours du chef d'État ukrainien Volodymyr Zelensky. « Pourquoi l'hémicycle était si clairsemé ? » s'interrogeait d'ailleurs L'Express. Peut-être en raison de la concurrence du choc Alcaraz-Sinner à Roland-Garros qui, elle, a fait le plein ? Mais peu importe. Ce n'est pas le sujet du jour, vous vous en doutez. Au travers de ces deux exemples inspirés par l'actualité, je voulais en réalité vous sensibiliser au sens réel de l'adjectif « clairsemé », que l'Académie définit ainsi :
En parlant des végétaux, disséminé, peu dru, peu dense. Du blé clairsemé. De l’avoine clairsemée. Un verger aux arbres clairsemés. Par analogie. Des cheveux clairsemés.
Et au figuré : peu nombreux. Les spectateurs sont clairsemés dans la salle. Une assistance clairsemée. Une population clairsemée.
L'affaire est donc claire. De la même manière qu' « achalandé » fait référence au nombre de clients d'un magasin ou d'un étal et non à la quantité des marchandises en vente, qu' « éponyme » se rapporte à celui qui donne son nom (un auteur éponyme) et non à celui qui le reçoit, c'est le contenu qui est clairsemé et non le contenant :  les arbres et non la forêt, le public et non les tribunes, les députés et non l'hémicycle, ce que nous confirment en bloc l'ensemble des lexicographes. Après cela, on ne pourra surtout pas leur reprocher de pratiquer la politique de la chaise vide. 

mercredi 5 juin 2024

Perversions électorales

Lu samedi dernier : « Le jour des élections, j’avais publié ce billet satyrique et prémonitoire pour remettre à sa place le prezida de la CENI qui se glorifiait de l’enthousiasme des citoyens à aller voter. » (Madagascar Tribune)

Vices de forme, actes d'inconduite, viols de la loi, nous connaissons tous les mœurs interlopes qui pervertissent depuis toujours le processus électoral malgache. Justifient-elles pour autant que l'on consacre un « billet satyrique » au scrutin législatif du 29 mai dernier ? Je n'y mettrais pas ma carte d'électeur au feu. Je serais davantage porté à croire que l'auteur dudit billet a tout simplement glissé le mauvais bulletin dans l'urne au moment de choisir entre deux redoutables candidats à la confusion sémantique : l'adjectif « satirique » et son pervers homophone « satyrique ». 
Le premier, pour rappel, qualifie tout discours, tout écrit, relevant de la satire, autrement dit, d'une vive critique, d'une raillerie acerbe. Le second nous renvoie quant à lui aux Satyres, créatures lubriques de la mythologie grecque, mi-hommes mi-bêtes, le plus souvent représentées dotées de cornes, de longues oreilles pointues, d’une queue et de pieds de bouc ou de chèvre, selon les versions. On les retrouve figurées dans les drames… satyriques (tiens, tiens !), pièces tragicomiques à la gloire de Dionysos. Peut-être faut-il y voir l'une des raisons pour lesquelles les termes « satire » et « satyre » furent un temps en concurrence avant de prendre des routes distinctes au milieu de XVIIIe siècle : à la « satire » l'ironie, au « satyre » la lubricité et l'obscénité. 
Il n'en demeure pas moins que les deux lascars n'en finissent pas d'entretenir la confusion. Pour preuve, ces quelques échantillons puisés  la presse numérique : 
« À l'Athénée, elle fait en cette rentrée théâtrale d'automne un pari gonflé, en s'attaquant à une pièce satyrique tardive de Jean Anouilh (1910-1987), « La Culotte » (1978). » (Les Échos)
« Sous la fresque, le graffeur Lekto indique qu'il s'agit d'une œuvre satyrique. » (Midi Libre)
« Inspirée par le roman satyrique crée par Jonathan Swift en 1721, la troupe catalyse et modernise le propos sur la folie du monde actuel, toujours avec un humour anglais décalé. » (Ouest-France)
Alors, que mon ancien confrère de la Grande Île se rassure. Il n'est pas le premier et ne sera pas le dernier à se laisser ainsi piéger. Je vous en ficherais mon billet. 

samedi 1 juin 2024

Henri J. se loupe au décollage

Lu il y a trois jours : « Ce sont les séquences « à pas forcés » que nous nous sommes fixés pour vous permettre de trouver désormais toute l’information, l’analyse et la réflexion, que vous êtes en droit d’attendre du premier journal de l’île. » (Le Quotidien de La Réunion)

On peut rêver de faire d'un ULM rouillé une rutilante « fusée à trois étages » et avoir les pieds sur terre. Henri Jacques Nijdam, le nouvel homme fort du Quotidien, en est la preuve vivante. L'homme a l'air plutôt sympathique. Il a des idées, et des bonnes, paraît-il. Et surtout, il n'entend pas brûler les étapes, comme en témoigne le message qu'il ne cesse de répéter depuis son arrivée aux commandes du premier journal de l'île : « Trois semaines, trois mois, trois ans ». Mardi dernier, c'est justement pour faire un premier point d'étape qu'il a saisi sa plus belle plume, parmi celles que ses prédécesseurs ne lui ont pas confisquées, pour rappeler les grands chapitres de son spatial projet.
Sur le fond, pas grand-chose à jeter. « « Plus d’actualités 
(au sens de « davantage », malgré l'impression laissée par les récentes éditions du journal) , plus de réflexion, plus d’ouverture sur le monde », une vision « Est-Ouest et non plus seulement Nord-Sud », et à plus long terme, une « véritable transformation digitale » du Quotidien. Rien que de louables résolutions, en somme, toutes visant à redresser la trajectoire du « Quot », comme le surnomment les gens du Journal de l'île !
Sur la forme, en revanche, on repassera. Fautes d'orthographe, de typographie, de syntaxe : le successeur de Carole Chane-Ki-Chune eût été bien inspiré de ne pas mettre le fuselage avant le moteur et de consacrer trois minutes à faire relire – et corriger si possible – sa copie avant de l'expédier dans la galaxie numérique. Cela nous aurait – peut-être – évité ce « que nous nous sommes fixés » qui n'aura pas manqué de chagriner tout lecteur au fait de l'accord des verbes pronominaux. 
Je ne vais pas reprendre par le menu cette règle qui, je vous l'accorde, compte parmi les plus indigestes de la grammaire française. Je lui ai déjà consacré plusieurs billets que je  vous invite à consulter ou re-consulter : 
https://moucatalire.blogspot.com/2023/01/se-sont-succedes-ou-se-sont-succede.html
https://moucatalire.blogspot.com/2022/02/rendez-vous-manque.html
https://moucatalire.blogspot.com/2022/05/rendez-vous-manque.html
Quoi qu'il en soit, mon cher Henri J., sans vouloir vous faire offense, sachez à toutes fins utiles que le participe passé des verbes occasionnellement pronominaux, et « fixer » en est un, se comporte comme s'il était accompagné de l'auxiliaire « avoir ». En clair, il s'accorde avec le complément d'objet direct si et seulement si ce dernier le précède. 
Il convenait donc d'écrire : « Ce sont les séquences "à pas forcés" que nous nous sommes fixées (et non « fixés ») », le COD « séquences » étant placé avant le verbe. Ou, sous une autre forme : « Nous nous sommes fixé des séquences à pas forcés » (le COD est ici placé après le verbe, donc pas d'accord).
Un ancien collègue à qui je faisais remarquer qu'ainsi maltraité, l'édito de son boss n'avait que peu de chances de convaincre son famélique lectorat, me fit cette réponse pleine de bons sens : « Au contraire, il est très convaincant… sur le fait qu'il faille embaucher des secrétaires de rédaction* », ceux-là mêmes qu' « HJN » s'empressa de propulser en bloc dans l'espace « inscription » de France-Travail. 
Mayday, mayday, mayday, il n'y a plus personne dans la tour de contrôle. 

* journalistes chargés, entre autres missions, de la relecture et, si besoin, de la réécriture des articles.

Récidive... à répétition

Lu il y a deux jours : « Des départs de feu à répétitions dans les champs de cannes ont été signalés dans le sud. » (linfo.re) Allez, soyons...