lundi 19 mai 2025

À quel(le) saint(e) se vouer ?

« Ce projet, on veut nous l'imposer dans le dos des Saint-Mariens et des Saint-Mariennes. » (linfo.re)

Ainsi parlait Richard Nirlo, réaffirmant sa volonté de voir jeter aux ordures l'encombrant projet d'installation d'un site de stockage de déchets ultimes sur sa commune. Nous mettrons donc sur le compte de la colère le fait que le maire de Sainte-Marie ait écorché le nom de ses administrés. À sa décharge, nous ne sommes jamais à une bizarrerie près en matière de gentilés, termes, je le rappelle, désignant les habitants d'un lieu, petit ou grand, de notre planète ou d'ailleurs. Qui devinerait, à moins d'y vivre, que les personnes domiciliées à Saint-Bonnet-le-Château se nomment les Cacamerlots, que Longcochon abrite les Couchetards ou qu'à Villechien on trouve les Toutouvillais ?

En réalité, la formation des gentilés ne répond à aucune convention grammaticale précise et laisse souvent libre cours à l'imagination. Or, Dieu sait que dans ce domaine, comme dans le choix des prénoms, elle peut être débordante. La pratique la plus… commune consiste toutefois à conserver la racine du nom et de l'affubler des suffixes « ois », « ien » ou « ais ». C'est comme cela qu'un beau jour, les habitants de Paris devinrent les Parisiens, ceux de Caen, les Caennais, et ceux de Cannes, les Cannois. 

L'affaire peut se compliquer quand le gentilé débute par un adjectif tel que « Saint(e)- », « Haut(e)- » ou « Petit(e)- ». Doit-on parler de Haute-Garonnais ou de Haut-Garonnais ? De Petite-îlois ou de Petit-îlois ? À Sainte-Maxime, comme à Sainte-Foy-lès-Lyon ou à Sainte-Geneviève-des-Bois, on a résolu le problème en supprimant ledit adjectif, ce qui a donné les Maximois, les Fidésiens et les Génovéfains. Pas très simple à retenir, mais au moins, cela évite les accords peu seyants. 

Preuve de la cacophonie ambiante, les communes du même nom engendrent rarement les mêmes gentilés. S'il vous prend l'idée de vous établir Sainte-Colombe dans le département de la Manche, vous deviendrez un Sainte-Colombien et vous, madame, une Sainte-Colombienne. Si votre choix se porte sur Sainte-Colombe dans le Lot, vous serez un Saint-Colombin et votre douce aimée, une Saint-Colombine, mais si vous élisez domicile à Sainte-Colombe, paisible village de quelque 400 âmes situé au cœur de la Gironde, vous viendrez grossir les rangs des Colombins et des Colombines. 

Tradition religieuse oblige, La Réunion compte neuf communes dont le gentilé commence par « Saint- » et trois par « Sainte- » : Sainte-Rose, Sainte-Suzanne et celle qui nous occupe aujourd'hui, Sainte-Marie. Souci de simplicité, d'harmonisation ou pur hasard – je pencherais pour le pur hasard –, il a été décidé de préserver intact l'adjectif « Sainte- », sans distinction de sexe. De fait, de la même façon que nous parlons d'une Saint-Louisienne ou d'une Saint-Pierroise, nous parlerons d'un Sainte-Rosien, d'un Sainte-Suzannois (ou Sainte-Suzannien, selon l'historien Prosper Ève) et d'un Sainte-Marien. N'en déplaise, messieurs, à votre orgueil de mâle, que je vous invite à enterrer le plus profondément possible. 

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