mercredi 23 mars 2022

Un peu de Zemmour que diable !

Illustration Courrier International
Lu hier :
« S’il est élu, Zemmour veut un ministère de la « re-migration et de l’expulsion des étrangers dont on ne veut plus » .» (linfo.re)

Je ne pensais pas trouver en Eric Zemmour ma muse du jour. Je n’aime pas le bonhomme, sorte d’Iznogoud mêlé de prince Jean. Je ne l’aimais déjà pas quand au petit écran, il taillait sans mesure costards et croupières à ses invités, flanqué de son compagnon de fiel Eric Naulleau. Je l’aime encore moins depuis que lui est venue l’idée saugrenue de troquer son costume de polémiste pour celui - encore plus étroit - de candidat à la présidentielle. Le seul avantage que j’y vois, c’est qu’il n’interrompt plus personne. Autrefois dictateur de la parole, Zemmour court aujourd’hui après les voix. 
Le bougre, lui, n’a pas perdu la sienne. Le Covid nous a propagé son lot de mots nouveaux ou remis au goût du jour, voilà donc que le virus Zemmour, variant à la dangerosité avérée, prend le relais. Hier, je parcourais les pages d’un site d’information concurrent quand mon regard se posa sur une déclaration qui, c'est de circonstance, me laissa sans voix : « S’il est élu, Zemmour veut un ministère de la « re-migration et de l’expulsion des étrangers dont on ne veut plus » .» 
Passons rapidement sur le fond, trop au fond pour que je m’y m’abaisse. Venons-en plutôt à la forme et à ce mot nouveau venu squatter notre belle langue : re-migration. Déjà le trait d’union ne me plaît guère tant il me paraît inutile, mais n’est-ce pas là le fidèle reflet de son utilisateur ? Ensuite, la re-migration, faut que l’on m’explique. En gros, si j’ai bien compris, on renvoie dans leur nid d’origine tous les oiseaux qui ne se nourrissent pas des vraies valeurs de SA France (je parle de celle d'Eric Zemmour bien sûr). 

Je me dis qu’en plus de vouloir repeupler notre langue, Zemmour serait sensible d’apprendre que, venus du latin, les ancêtres du verbe « migrer » ont devancé les siens de quelques siècles au pays de Molière et Hugo. Au fil du temps, la famille a même procréé. Ont vu le jour « émigré, immigré, émigration, immigration, migratoire, migrateur », tous en règle aux yeux des instances supérieures de langue française. Mais je ne doute pas qu’il en connaisse la lignée par cœur.
À l’image de la population qui est celle de notre pays, le français (sans majuscule, je parle de la langue) n’est que vagues d’immigrations successives et c’est ce qui fait sa richesse, sa diversité et sa beauté. De l’époque des Gaulois, ne nous restent que quelques centaines de termes irréductibles tels que chêne, bouleau, mouton, alouette, bouc, saumon ou cheval. Latin, grec, arabe, italien, espagnol, allemand, anglais et même russe sont venus tour à tour apporter leur pierre à notre édifice linguistique. 

S’il venait à être à court d’idées dans sa croisade pour une France propre et bien de chez nous, je suggérerais volontiers au chevalier Zemmour de glisser à l’oreille de son futur « ministère des Mots que l’on veut refouler » (s’il est élu bien sûr) de remettre dans le bateau pour Douvres les 10% d’anglicismes qui vivent plus ou moins légalement sur notre territoire. Dehors le football de mon enfance, les girlfriends de mon adolescence… Dehors aussi hamsters, jupes, gilets, magasins, toilettes et tambours, merguez et méchouis, cannellonis, mozzarella et chianti, oust !!!!
D'aucuns m’objecteront qu’il n’y a pas lieu de s’énerver, que le personnage a un bon fond, qu’il est juste taquin, un brin provocateur et que ses propos ne doivent pas être pris au pied de la lettre. Un peu de z’humour que diable ! Un peu de Zemmour, sûrement pas. 


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