mercredi 24 mai 2023

Drôles de pérégrinations !

Lu hier à propos d'une vidéo réalisée grâce à l'intelligence artificielle et dans laquelle, se sortant les pieds de son socle, Mahé de la Bourdonnais nous explique de vive voix qu'il n'est pas celui que ses détracteurs veulent faire croire : « Il rappelle ensuite que la statue installée en 1856 par le gouverneur Hubert Delisle "va partir en 2023 en pérégrination pour une destinée inconnue sur prescription d'un autre préfet". » (Zinfos974)

Pérégrination (ne pas écrire « périgrination »). Que voilà un bien grand mot pour un si petit trajet. ! Car si le projet de la maire de Saint-Denis ne se noie pas dans la vague de protestations qui le submerge actuellement, la statue à l'effigie de Bertrand-François Mahé de la Bourdonnais (et non Labourdonnais, comme on le lit trop souvent) n'aura à parcourir que les quelques centaines de mètres qui séparent à vol d'oiseau le Barachois de la caserne Lambert. Or, on ne part pas « en pérégrination », pour autant que l'expression existât, comme on part en balade. 
Le terme est apparu dans notre langue bien avant que le soudainement très controversé ancien gouverneur des Mascareignes ne « sévisse » sur notre île. Quelque six siècles plus tôt pour être exact. « D'abord écrit peregrinaciun » (1120), le substantif « pérégrination » « est emprunté au latin peregrinatio, -onis qui désigne un voyage ou un séjour à l'étranger et spécialement en latin chrétien, la vie terrestre considérée par métaphore comme un voyage loin du Ciel, vraie patrie du croyant, ainsi que le pèlerinage aux Lieux saints. Peregrinatio est  le nom d'action dérivé du supin (peregrinatum) de peregrinari, "voyager à l'étranger, y séjourner"), lui-même dérivé de peregrinus (→ pèlerin) », retrace Alain Rey (Dictionnaire historique de la langue française), grand explorateur de la langue devant l'Éternel. 
Mais je vous parle là d'un temps que les moins de 500 ans ne peuvent pas connaître. De nos jours, « pérégrinations » ne s'emploie plus qu'au pluriel et cela, pour désigner des « déplacements incessants en de nombreux endroits », selon Robert, « un voyage, un trajet complexe d'un lieu à un autre », préfère Larousse. Vous avez dit complexe ? Après tout, n'est-ce pas finalement le terme approprié pour qualifier le débat sur fond d'esclavagisme qui divise les pro et les anti-Mahé ? Preuve que ce n'est pas la longueur du voyage qui compte mais bien le symbole qu'il revêt. 

La vidéo « ressuscitant » Mahé de la Bourdonnais est visible à l'adresse suivante : https://www.zinfos974.com/Video-Mahe-de-Labourdonnais-reprend-vie-pour-se-defendre-a-travers-l-IA_a196086.html


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