vendredi 22 décembre 2023

L'oppression de l'usage

Lu hier : « De la Palestine à la République du Congo, de la Libye au Soudan, de l'Iran à l'Afghanistan, les peuples continuent d'être réprimés, oppressés, exploités et massacrés par leurs dirigeants ou leurs voisins. » (Imaz Press Réunion)

Le danger avec les paronymes, c'est que par définition, ils se ressemblent. Tellement, parfois, qu'on finit par les confondre. Les verbes « opprimer » et « oppresser » n'échappent pas à la règle. Et en y regardant de plus près, on comprend rapidement pourquoi. Le Dictionnaire historique de la langue française nous apprend ainsi qu' « opprimer » est un emprunt au latin opprimare qui signifiait « presser, comprimer », acceptions très proches de notre actuel « oppresser », et qu'au figuré, il équivalait à « faire pression sur, accabler ». « Oppresser », lui, est issu d'oppressum, lui-même supin… d'opprimere, comme on se retrouve ! Il est apparu au milieu du XIVe siècle avec le sens d'… « accabler par excès d'autorité ». 

En résumé, il fut une époque où « opprimer » et « oppresser » pouvaient s'employer indistinctement sans encourir l'opprobre de vétilleux linguistes. Pour éviter toute concurrence inutile, on décida toutefois de leur répartir les rôles. Voilà pourquoi de nos jours « oppresser » s'emploie au sens de « gêner la respiration » ou d’ « accabler moralement », laissant à « opprimer » celui de « soumettre à une autorité injuste et violente ». Étonnamment, bien que différents, les deux verbes ont gardé le même substantif, en l'occurrence « oppression ». 

Ainsi va la langue française, éternel tyran qui nous opprime… et nous oppresse.

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