Si l’un de vos amis vous invite un jour à venir avec lui descendre les gorges de l’Ardèche en canoë-kayak, soyez sur vos gardes. Vous ne ferez pas plus de canoë-kayak que de bateau à vapeur dans les eaux calmes de l’ancienne région du Vivarais. Vous n’en ferez pas, pour la bonne et simple raison qu’en termes d’embarcation, le canoë-kayak, ça n’existe pas.
Canoë et kayak sont en effet deux bateaux bien distincts. De par leurs origines d’abord. Le premier nous vient du peuple amérindien, le second du froid pays inuit. De par leur conception ensuite. Le canoë est un petit canot mué à l’aide d’une pagaie simple (une seule pale), qui se manie à genoux, assis sur un banc. C’est notamment dans cette discipline que s’est illustré l’actuel président du Comité d’organisation des JO de Paris et triple champion olympique Tony Estanguet.
Le kayak, lui, est un bateau léger propulsé grâce à une pagaie double que l’on actionne alternativement d’un côté et de l’autre de l’embarcation. À la différence du canoéiste (les pratiquants disent céiste, terme ignoré de la plupart des dictionnaires), le kayakiste est assis au fond du canot, jambes allongées. Apparu dans les années cinquante, le canoë-kayak n’est en réalité que le mariage « administratif » de ces deux disciplines, auxquelles se sont greffés au fil de l'eau d’autres sports de pagaie tels que le raft ou le wave-ski.
Alors, vous l’imaginez, je n’ai pu réprimer un sourire en coin en parcourant les articles numériques consacrés ces derniers jours à la venue dans notre île de grands champions étrangers : le Slovène Peter Kauzer, « multiple médaillé en Canoë-Kayak Slalom », décrit Linfo.re ou encore Jiri Prskavec, « médaillé d’or olympique aux JO de Tokyo en Canoë-Kayak », selon Zinfos974. Imaz Press Réunion se réjouissait pour sa part et à juste titre que « cette reconnaissance internationale » ait permis au stade en eaux vives de Sainte-Suzanne « d’arborer le label Terre de Jeux pour la discipline Canoë-Kayak Slalom ». Alors, canoë ou kayak, kayak ou canoë ? Pour information, Peter Kauzer et Jiri Prskavec sont des kayakistes, tout comme l’Allemande Andrea Herzog, qui les accompagne.
Je m’amuse de voir la concurrence ramer dans les remous de la terminologie sportive et ce n’est pas bien. C’est d’autant plus mal que je ne dis pas qu’il y a plus de trente ans, lorsque je fourbissais mes pagaies de jeune journaliste, je ne me serais pas laissé embarquer par le piégeux courant du canoë-kayak.
En attendant, si finalement vous vous décidiez à faire un détour par l’Ardèche, méfiez-vous des annonces du genre : « Le CKCP offre un service de location de canoës-kayaks tous les jours de 14 h à 18 h en semaine et de 10 h à 19 h 30 le dimanche. » Vous risqueriez fort de vous retrouver le bec dans l'eau.
Remarque 1 : « canoë » s’écrit avec un tréma sur le « e » final et non sur le « o » qui le précède.
Remarque 2 : à contre-courant de toutes les autres sources crédibles de la langue française, le Larousse en ligne propose une version plurielle du terme canoë-kayak (canoës-kayaks), alors que le Grand Larousse illustré en fait un « nom singulier ». Allez comprendre !
Remarque 2 : à contre-courant de toutes les autres sources crédibles de la langue française, le Larousse en ligne propose une version plurielle du terme canoë-kayak (canoës-kayaks), alors que le Grand Larousse illustré en fait un « nom singulier ». Allez comprendre !
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