mardi 25 janvier 2022

Impact, l'onde de choc

Lu dernièrement : "Au total, huit véhicules ont été impactés, partiellement ou entièrement détruits. (Zinfos974)


Dans les années quatre-vingt-dix, l’ancien grand attaquant anglais Gary Lineker prononça cette phrase devenue culte : « Le football est un sport qui se joue à onze contre onze, et à la fin, c'est l'Allemagne qui gagne. » Dans la langue française aussi, il n’y a qu’un seul vainqueur. A tort souvent, à raison parfois, l'usage finit toujours par avoir le dernier mot. 

C’est sous son influence que s’est notamment propagé le verbe « impacter », terme passe-partout employé pour exprimer un effet, de quelque nature et de quelque importance que ce soit. De nos jours, tout est impacté, notre vie, notre moral, l’économie, le climat, le bien-être au travail, la fertilité des couples, les finances de l’Amicale des boulistes de Cochonnet-sur-Mer ou l’humeur des bigorneaux. Tout, je vous dis. Surtout depuis l’arrivée de l’ « impacteur » numéro un de ce début de siècle : le Covid, source de tous les bouleversements, de toutes les mutations et de tous les tracas. 

Il n’y a qu’une chose qu’ « impacter » n’impacte pas. C’est l’acharnement des puristes à condamner son emploi. Rangés en ordre de bataille derrière l’Académie, ces derniers considèrent qu’il n’est rien d’autre qu’un cadeau empoisonné venu d’outre-Manche et qu’il éclipse abusivement les verbes bien de chez nous que sont toucher, marquer, se répercuter, affecter, heurter, influer, influencer, atteindre, etc. 

Une telle levée de boucliers n’est pas une surprise en soi. Elle va dans le sens du combat mené par les mêmes linguistes contre le recours tout aussi « abusif » du substantif « impact ».  Pour rappel, un « impact » désigne « le choc d’un projectile contre un corps, ou la trace, le trou qu’il laisse ». On parle de l‘impact d’une balle sur un mur, de l’impact d’un rocher sur la chaussée, de l’impact d’une météorite sur la Terre, de l’impact d’un coup sur le visage. 

Au figuré, il exprime « un effet violent, une vive répercussion », insiste le grammairien Maurice Grevisse. Autrement dit, « impact » ne peut se substituer à « conséquence, influence, effet, résultat, retentissement, contrecoup, portée, poids » ou encore « retombées », s’il ne décrit pas une brutalité soudaine dont il reste à délimiter les contours et ce n’est pas là une mince affaire. 

En attendant, pour nous éviter des migraines inutiles, Robert et Larousse ont réglé la question à leur façon : en élargissant le sens d’ « impact » à tout type d’influences, fortes ou diffuses. Dans leur grande et légendaire largesse, ils en ont profité pour ouvrir leurs portes au verbe « impacter », en prenant soin toutefois de se protéger derrière les mentions - habituelles quand on ne veut pas se mouiller — « anglicisme » pour le premier, « familier » pour le second. Hypocrite précaution, quand on sait que de telles « mesures barrières » n’ont jamais eu le moindre effet dissuasif sur la propagation des virus langagiers. 

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