lundi 28 février 2022

Avenir, futur sans lendemain


Lu ce matin : « Ce grand recensement a pour objectif de permettre aux Malgaches de l’étranger (« Malagasy ampielezana ») de participer dans le futur aux différentes élections qui se déroulent dans la Grande île (présidentielle, législatives…). » (Le Quotidien)

À l’entrée « avenir », Larousse propose « temps futur ». Et à l’entrée « futur », la même maison écrit : « temps à venir ». Ainsi que le constate, non sans une certaine - et justifiée - ironie, Marc Raynal sur son blog « Parler Français », que je vous recommande vivement, « les dictionnaires usuels ne nous aident pas toujours ». Pas toujours, et comme souvent, aurait-il pu ajouter. 

Vouloir à tout prix distinguer les termes « avenir » et « futur » fait-il partie de ces combats d’arrière-garde menés par de vieux linguistes ronchons en quête d’os à ronger ? Que nenni ! si l’on en croit l’Académie française. Le contraire eût été étonnant quand on connaît la propension des sages du quai de Conti à penser que « dans le temps, même le futur était mieux ». « Avenir », expliquent les Immortels, désigne une époque que connaîtront ceux qui vivent aujourd’hui, alors que « futur » renvoie à un temps plus lointain. On dira donc « À l’avenir, je serai vigilant » et pas « dans le futur, je serai vigilant ». Si l'on suit leur raisonnement, l’expression « proche avenir » serait donc un pléonasme quand « futur proche » relèverait du contresens. 

Pour l’Office québécois de la langue française, « le nom futur s’emploie le plus souvent par opposition à passé et à présent ; son sens est essentiellement temporel. Il renvoie à un temps à venir imaginé, lointain, sans référence particulière à ce qui adviendra dans ce temps à venir. Le nom avenir quant à lui renvoie à quelque chose de plus concret, de plus proche. » Selon Littré, « le futur est ce qui sera ; l’avenir est ce qui adviendra ». 

Et comme souvent lorsque quelque chose ne tourne plus rond dans la langue de Molière, c’est vers celle de Shakespeare que l’on s’empresse d’aller chercher la cause des maux de tous nos mots. « Employer futur au lieu d’avenir est un anglicisme à proscrire », fustige l’essayiste Alfred Gilder. Le grammairien Jacques Capelovici déplore que sous l’influence de l’anglais future, « futur » remplace de plus en plus souvent « avenir ». Membre du Conseil international de la langue française, Michèle Lenoble-Pinson, pour sa part, regrette que « sous l’influence de l’anglais future, le mot futur (soit) abusivement employé pour avenir ». 

On le voit, les Académiciens ne sont pas les seuls à veiller au bon respect des nuances langagières. L’usage contemporain, lui, ne s’embarrasse pas de telles distinguos. Il n’est pas rare d’entendre parler du « futur d’une star du football » ou de « l’avenir de l’humanité ». Les médias regorgent de tels débordements temporels. Preuve que la confusion a encore un bel avenir — à moins qu’il ne s’agisse d’un beau futur. Et demain, sans doute plus qu’aujourd’hui.

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