Lu ce matin : « A l'heure actuelle, sans revalorisations salariales plus conséquentes, les plus petits coefficients de la grille BTP seront rattrapés par le SMIC qui doit augmenté (sic) en mai a minima de 2,4%, défendent ses représentants. » (Réunion la 1ère)
Il y a du beau monde sur le banc des accusés. La Voix du Nord, Sud Ouest, La Libre Belgique, La Presse (grand journal québécois), Le Point, Les Échos, L’Obs, Le Télégramme, Le Parisien, La Nouvelle République, La Tribune, Le Figaro, Ouest-France, La Dépêche… Allez, je ne vais pas vous mentir. En l’espace de 24 heures, au moins une quinzaine de titres majeurs de la presse nationale et régionale francophone ont employé la formule a minima au sens condamné de « au minimum », « au moins », « au bas mot », acceptions qu’à ce jour aucun défenseur du gaulois moderne, pas même nos complaisants Dupont et Dupond (Larousse et Robert, je dirais même plus, Robert et Larousse pour les non-initiés) n’a eu la faiblesse d’introniser, c’est tout dire.
Au dire de ses avocats, la locution latine en question, dans sa version intégrale a minima poena (à partir de la plus petite peine), n’aurait jamais dû quitter sa sphère originelle, celle du droit, où un appel a minima signifie que « le ministère public fait appel pour augmenter une peine qu’il juge en inadéquation avec la faute commise », dixit l’Académie française dans la 9e édition de son dictionnaire, entamée en 1935 et pour la petite histoire, toujours pas terminée. S'il n'y a pas quelque procrastination coupable derrière tout cela... À l’inverse, nous dit-elle, un appel a maxima est fort logiquement « un appel visant à diminuer la peine prononcée ».
Devant l’usage qui en est fait aujourd’hui, les puristes crient bien sûr à l'hérésie, c'était à prévoir. « On lui fait donc dire à peu près le contraire de ce qu’elle signifie. Mais qu’importe, pour beaucoup d’ânes savants elle est un bel ornement au parfum latin, une façon de faire riche à peu de frais », ironise le blog des correcteurs du Monde.
Je l’ai déjà affirmé, je ne suis pas fan des extensions de sens qui n’ont pour seule justification que d’absoudre une erreur de langage, une propagation abusive. Mais doit-on pour autant envoyer aux Assises tout usager supposé coupable d’avoir fait de a minima un synonyme de « au moins » ? Je n’en suis pas sûr. Pour tout dire, j’en doute même fortement. Car à y regarder de plus près, parler de « bénéfices a minima », « de salaire a minima », « de recrutement a minima » ne sous-entend-il pas la perspective, la possibilité, l'éventualité ou au moins le simple espoir d’une évolution à la hausse ?
Je fais appel à votre bon sens et vous laisse le soin d’en juger.
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