mardi 13 septembre 2022

L'échappée... balle

Un ancien collègue me confiait récemment son agacement devant la prolifération dans le jargon sportif de l’expression  « échapper le ballon ». « Après un relai (sic) de Harris, le capitaine Stuart Hogg échappe la balle alors qu'il filait seul derrière la ligne. » (Rugbyrama) 

Exemple parmi d’autres de cette manie actuelle qui consiste, souvent sous l’influence de l’anglais, à rendre transitives des tournures qui n’ont pas lieu de l’être : « jouer une équipe » pour « jouer contre une équipe », « signer un joueur » pour faire « signer un joueur » ou encore « exploser une défense » au lieu de « faire exploser une défense ». 

Ironie de l’étymologie, ce qui est de nos jours considéré comme une grossière faute grammaticale ne l’était pas au XIIIe siècle. À cette époque, le verbe « échapper » pouvait en effet s’employer transitivement au sens de « laisser partir, laisser tomber involontairement ». Aussi, quand un joueur de « soule » (ou de « choule ») échappait la vessie de porc qui lui servait de ballon, il ne se trouvait aucun grammairien pour sortir le carton rouge. 

Si la forme a officiellement disparu au profit de « laisser échapper », elle reste vivace au Québec. En témoignent ces récents extraits d'articles de presse : « Ils ont échappé la balle », ajoute la conjointe de ce dernier, Michele Roy (...) » (La Presse); « T.J. White a profité du fait que le receveur adverse a échappé la balle pour fouler la plaque. » (Le Journal de Québec)

Elle subsiste également en Lorraine, en Charente et dans certaines terres d’ovalie du sud de la France. N’y voyez surtout pas une raison suffisante pour vous laisser aller à de tels débordements langagiers. 

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